Au coeur de l’intelligence collective

table world café

Récemment, j’ai participé à une formation sur l’intelligence collective, proposée par le centre Iris Créativité. Au programme ? Expérimentation et décryptage de deux outils puissants : le World Café et le Forum Ouvert.

 Je vous propose de partager avec vous quelques-unes de mes prises de conscience à l’issue de ces deux jours, en insistant davantage sur l’outil « World Café » (je consacrerai plus tard un article au Forum Ouvert). 

A ceux qui découvrent le World Café, imaginez-vous les ingrédients suivants :  

– un groupe partageant une problématique commune

– des sous-groupes de 4 personnes, répartis autour de petites tables 

– des questions porteuses de sens pour le groupe, dévoilées au fur et à mesure

– des tours de conversations progressifs, générant des partages d’expériences et des idées nouvelles 

– des déplacements de table en table entre chaque tour de conversation

– une synthèse collective, captée visuellement sur une fresque murale

Pour résumer, le World Café s’apparente à un processus créatif qui s’articule autour de conversations tournantes. Conçu par Juanita Brown et David Isaacs, il est né du constat suivant : les personnes ont en elles-mêmes la créativité et les ressources nécessaires pour résoudre une situation problématique, mais c’est en partageant leurs expériences et en croisant leur regard qu’elles sont capables d’en prendre conscience. La force du World Café est de pouvoir créer un focus d’attention générateur d’idées tout en préservant un cadre informel et décontracté.

La puissance créatrice d’une conversation

 J’avais déjà participé à plusieurs World Café et facilité visuellement quelques-uns. Mais depuis que j’ai vécu la formation au World Café avec les autres stagiaires d’Iris, j’ai décrypté le processus de l’intérieur, en profondeur. Cette phrase d’Adam Kahane résonne en moi : « pour changer le monde, il faut commencer par changer la façon dont on parle et on écoute ».

J’ai ressenti, de manière très claire, la puissance créatrice d’une conversation. Certes, des conversations, nous en avons tous les jours. Mais combien sont celles qui nous restent en mémoire ? Lesquelles nous ont transformé de l’intérieur ? Comment en soigner la qualité pour les laisser nous surprendre et nous enrichir ? Au cours de cette formation, nous nous sommes donc attachés à décrypter et comprendre les processus qui rendent une conversation si passionnante, fondatrice, constructive et aussi… agréable. Voici, à ce sujet, 3 clés qui m’ont marquée.

Soigner le cadre 

Une conversation ne se décrète pas, elle émerge. Plus l’ambiance dans laquelle elle prend place est agréable et décontractée, plus la conversation pourra se déployer. Un cadre trop codifié ou rigide peut anéantir tout effort de dialogue – par exemple, si les personnes sentent d’emblée qu’elles ne sont pas autorisées à s’exprimer librement, ou que leur parole n’a pas de valeur ou n’est pas écoutée.

Proposer un cadre à la fois sécurisant et souple, c’est la tâche des facilitateurs en intelligence collective, qui accordent une importance particulière aux aspects logistiques (taille de la salle, acoustique, décoration, matériel à disposition, fond sonore…) 

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Poser des questions pertinentes

Une conversation naît souvent à partir d’une certaine tension à résoudre. Cette tension est féconde, c’est notamment elle qui nous amène à rechercher le point de vue des autres, pour décentrer son regard et aborder le problème à travers un autre angle. Cette tension peut être révélée à travers une question, si cette question est pertinente, c’est-à-dire si elle prend en considération le groupe et le contexte dans lequel  il évolue : quels sont ses enjeux ? ses problématiques actuelles ? ses défis ? Une question trop déconnectée de la réalité des participants risque de ne pas susciter beaucoup d’enthousiasme. L’enjeu est bien de proposer une question qui en génèrent d’autres, qui impulse de l’énergie et donne envie de confronter les points de vue. Inutile de miser sur des questions fermées ou sur des questions dont on a déjà la réponse ! Qui dit question dit avant tout ouverture, accueil, état de disponibilité, multiplicité des points de vue… 

Préparer « l’après » bien avant

Converser sur le moment, c’est bien. Mais s’appuyer sur la richesse des conversations pour donner naissance à un « après » commun, c’est mieux. Pour décupler la force d’un World Café, le but ultime des conversations doit être clair et explicité auprès des participants dès le départ (par exemple : trouver de nouveaux produits, élaborer une campagne commerciale, bâtir une stratégie pour 2017, imaginer des modes de collaboration inédits au sein de tel département, partager des expériences pour réaliser un inventaire de bonnes pratiques…) Il est nécessaire de replacer les conversations dans une temporalité plus vaste. Les conversations sont  par nature vivantes, évolutives et protéiformes : les réduire à un espace-temps défini (celui du World Café) est donc contre-productif. L’enjeu est au contraire d’imaginer des modalités pour que les conversations se poursuivent et instillent leur énergie, de façon à permettre aux idées générées de vivre leur vie. Cela passe aussi par la présence d’un facilitateur graphique pour capter l’essentiel des échanges lors du temps de synthèse collective.

Voici un aperçu du scribing réalisé par Vanina Gallo lors de la formation des 28-29 janvier 2016.

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world café synthèse visuelle