Photo Auxane Photographie
J’ai vécu mon premier atelier de danse inclusive avec la T.R.O.U.P.E, hier, à l’Armorica (Plouguerneau).
Nous étions 80 à partager cette expérience, des personnes de tous horizons, de tous les âges, en situation de handicap ou non. L’invitation posée était de se laisser guider, sans rien forcer. Toujours suivre le chemin de notre liberté. Mettre au premier plan nos élans, s’ouvrir à ce qui nous appelle, y répondre à notre façon. Je vous raconte ma traversée !
Je suis témoin immobile… et concernée
Installé·e·s en cercle, nous commençons par être témoins d’une rencontre entre deux personnes de la T.R.O.U.P.E, assises face-à-face, sur des chaises rapprochées. Elles ont la tête baissée, entièrement relâchée, comme pour nous souffler que l’essentiel de l’expérience échappe au galop du mental. Elles entrent en contact par le toucher, le bout de leurs doigts traçant des chemins réciproques sur le corps de l’autre, en remontant lentement des genoux jusqu’aux épaules. A ce moment-là, je sens déjà en moi comme quelque chose qui se détend et qui s’ouvre à la fois. Je n’ai pas bougé d’un millimètre, mais je perçois, à travers la puissance de l’empathie corporelle, une autre qualité de corps en moi. Ma matière résonne, répond, se sent entièrement concernée par l’émergence de cette danse.
Mes sens m’embarquent dans la danse
Puis, les deux personnes sont rejointes par d’autres, plus ou moins mobiles, qui semblent reliées par un fil… peut-être celui de la délicatesse. Des duos se forment, la danse les traverse. Des plumes blanches volent dans l’espace et circulent de mains en mains, jusqu’à arriver au creux des miennes. Comme une invitation adressée à chacun·e : devenir plume, suivre le vent de nos élans. La plume réveille en moi l’appel de la danse.
Je m’engage dans l’espace. Je risque la rencontre. J’échange un regard, un geste. Je me souviens d’une qualité de toucher, du frémissement d’une lèvre, de la mobilité d’un regard. Je sens la soif du lien, la pudeur ou l’émotion. Nous nous reconnaissons en tant qu’humains, humaines. Nos corps partagent une même quête : être là, entièrement là, ensemble.
Goûter ce qui m’habite
De nouveaux partenaires de danse apparaissent : ce sont des foulards, qui fendent l’espace, glissent entre les corps, les effleurent ou les enveloppent. Ils deviennent nos complices pour oser le mouvement et entrer en relation. Nous explorons en duos : une personne a les yeux fermés (la fleur), l’autre lui fait goûter des sensations par l’intermédiaire du foulard (le petit prince). Puis les duos s’ouvrent à l’ensemble de l’espace. Nous nous déplaçons à différentes vitesses, en sentant le grand corps que nous formons. Chaque élan, chaque geste, chaque souffle compte. Nous laissons monter un tourbillon de mouvement composé de trajectoires singulières comme de pauses éphémères.
C’est ma présence qui danse
Cet atelier nous rappelle, de façon expérientielle, qu’il y a tant de façons de danser. Si l’on réduit la danse à des corps en mouvement, on passe sans doute à côté de l’essentiel. La danse se déploie aussi et surtout dans cet infiniment petit qu’on ne voit pas, ou plus : la densité d’une présence. Et cette présence, qui prend racine dans notre être profond, déborde du corps, que celui-ci soit mobile ou non.
Je suis rentrée émue.
Ce projet est impulsé par la chorégraphe Laure Fouard, de la compagnie De l’encre sur les pieds.
